Blog Maison Trencavel

Maison Trencavel

Laurent
Rencontre avec Florian, graphiste et illustrateur talentueux, passionné par le dessin et l'univers médiéval. Avec plus de 45 000 abonnés sur Instagram, son projet "Maison Trencavel" qui n'était au départ qu'un simple passe-temps est rapidement devenu son activité principale…

Peux-tu te présenter à nos lecteurs ? Quelle est l’origine du nom de ton activité “Maison Trencavel” ?​

On me connaît sous le pseudo de Maison Trencavel. J’ai 30 ans, et je suis dessinateur autodidacte, principalement dans l’univers médiéval. Après le BAC, j’ai suivi plusieurs années d’études en design graphique. Aujourd’hui, je travaille encore dans ce domaine, même si le dessin occupe une place de plus en plus importante dans ma vie.

“Maison Trencavel” est nom d’une famille de seigneurs occitans qui ont régné un temps sur la région. Le terme Maison désigne une dynastie. Je suis originaire du Tarn, j’y ai vécu jusqu’à mes 18 ans, et j’ai fait des études supérieures à Toulouse ensuite.

Depuis combien de temps développes-tu cette activité ?

Je dessine depuis l’enfance, mais cela fait maintenant trois ans que j’ai lancé mon compte Instagram, qui a véritablement marqué le début de mon activité. Comme mentionné plus haut, je suis encore designer graphique à ce jour.

— Dessins en vente, 2024

Peux-tu nous parler de ton processus de création ? Où trouves-tu l'inspiration ?

Je trouve certaines de mes idées dans des livres d’histoire, mais, le plus souvent, c’est en lisant des sources historiques que je puise mon inspiration. Aujourd’hui, grâce à Internet, il est facile de retrouver d’anciennes chroniques ou autres documents d’époque. Ce sont les meilleures sources d’inspiration que j’ai pu trouver.

Une fois l’idée trouvée, il s’agit d’imaginer comment la mettre en scène : parfois, la description d’une chronique ou d’un livre d’histoire suffit à me guider ; d’autres fois, il me faut chercher davantage et prendre le temps de trouver la bonne approche. Tant que je ne tiens pas une idée qui me paraît satisfaisante, je continue mes recherches.

En parallèle, je réalise de nombreux petits croquis pour tester différents rendus et évaluer ce qui pourrait fonctionner. Une fois la composition définie, je fais des recherches rapides pour obtenir les références nécessaires (forme d’un bouclier, d’un casque, d’un tissu, d’un cheval, etc., afin de ne négliger aucun détail). Ensuite, je crée une esquisse légère au crayon, que je corrige si besoin, avant de refaire une seconde esquisse plus aboutie, toujours au crayon, puis de passer à l’encrage et aux ombrages.

Pour finaliser, je photographie le dessin, effectue quelques retouches numériques si nécessaire (contraste noir/blanc, suppression ou remplacement du fond), puis je dispose le dessin dans une composition plus large.

Quels outils utilises-tu ? Dessines-tu tous tes sujets à main levée ?

Je n’utilise pas de papier calque, mais il m’arrive de décalquer grossièrement les formes principales d’une référence en posant directement une feuille normale sur l’écran pour avoir des repères.

Ensuite, je dessine à main levée à partir de ces repères. Comme matériel, j’utilise un crayon à papier et des stylos à encre noire de différentes épaisseurs. Je privilégie du papier blanc, lisse et suffisamment épais pour ne pas gondoler avec l’encre.

— Le vicomte de Béziers, 2022

Tu sembles privilégier des outils traditionnels. As-tu envisagé de travailler en numérique ?

Je travaille aussi en numérique, mais uniquement quand c’est nécessaire. En général, c’est pour obtenir une version vectorielle du dessin, comme pour un logo, un blason, ou une carte (afin de copier/coller des éléments et travailler plus rapidement).

Je préfère toutefois le dessin traditionnel, car le rendu final d’un dessin numérique me séduit rarement. Il manque, selon moi, ce côté artisanal que l’on retrouve dans le travail à la main. C’est aussi une question de confort : une tablette graphique est souvent inconfortable pour le poignet et nécessite des branchements, ce qui peut être contraignant. Le dessin traditionnel, lui, ne demande qu’une feuille, un crayon et un stylo.

Cependant, le principal inconvénient du dessin traditionnel est qu’il ne permet pas d’erreur : on ne peut pas revenir en arrière, effacer ou modifier un trait, ni zoomer pour travailler en détail sur une zone spécifique.

Combien de temps nécessite la réalisation d’une illustration ? Utilises-tu des techniques pour simplifier le processus ?

En moyenne, il faut compter quelques heures entre l’émergence de l’idée et la finalisation du dessin.

Pour les illustrations les plus courtes, une à deux heures peuvent suffire, notamment pour un personnage à pied. Dans ce cas, la phase d’esquisse et d’encrage prend généralement entre 20 et 40 minutes, à condition que la recherche en amont ne soit pas trop longue.

À l’opposé, il m’est déjà arrivé de travailler environ 80 heures sur une illustration complexe, notamment pour une commande. Ce type de projet, comme une carte illustrée d’une vaste région, demande un travail minutieux : chaque élément, qu’il s’agisse des montagnes, collines, villages ou hameaux, doit être dessiné individuellement.

Je préfère éviter d’automatiser mon processus, surtout pour les commandes clients, où chaque détail est réfléchi et réalisé à la main. L’IA ne m’apporte pas encore d’assistance pertinente dans ce domaine, si ce n’est pour des recherches textuelles ou d’information, que je fais ponctuellement à l’aide d’outils comme ChatGPT.

— Juin 2022

Parmi tous les sujets et les scènes que tu dessines, y en a-t-il des plus difficiles que d’autres à réaliser ? Certaines que tu préfères à d’autres ?

Il n’y a pas de scène particulièrement difficile en soi, mais certains éléments sont plus complexes à représenter, quelle que soit la scène : les visages, par exemple, demandent une précision particulière. De même, certains symboles, comme les fleurs de lys ou les croix occitanes, sont techniquement exigeants en raison de leurs formes arrondies et détaillées.

En travaillant en noir et blanc, certaines contraintes supplémentaires apparaissent. La représentation des effets météorologiques (pluie, brouillard) ou de phénomènes comme la lumière, la nuit, l’eau ou le feu demande une réflexion approfondie pour obtenir un rendu visuel convaincant.

Ce que je préfère, c’est faire découvrir et mettre en lumière des histoires, personnages ou événements à ma manière. Beaucoup de gens sont passionnés par l’histoire, et j’essaie d’aborder ce sujet différemment, en retranscrivant un aspect plus martial ou des éléments qui me semblent particulièrement intéressants.

Au lancement de ton compte Instagram, tu te concentrais sur les scènes de chevalerie. Aujourd’hui, tu as élargi ton champ avec des dessins de cartographie. Peux-tu nous en parler ?

J’ai toujours eu un intérêt particulier pour les cartes anciennes, notamment celles enrichies d’éléments illustrés. Naturellement, j’ai commencé à en dessiner une ou deux pour le plaisir. À partir de là, certaines personnes m’ont demandé des cartes personnalisées après avoir vu mes réalisations.

De commande en commande, je reçois de nouvelles demandes, ce qui me permet de continuer à pratiquer et à m’améliorer dans ce domaine. Cette diversification enrichit également ma pratique artistique.

Comment ta formation en design a-t-elle influencé ton projet ?

Ma formation m’a permis d’acquérir des notions essentielles, qui se révèlent très utiles dans mon travail d’illustration.

À la fin de chaque dessin, une fois la photo prise et le fond retiré, je passe plusieurs minutes à ajuster la composition. Je joue avec le blanc tournant pour trouver la position idéale du sujet : sa place dans le vide, son orientation, sa taille, et son emplacement final dans l’image. Cette étape fait appel à des notions de design et me permet de sublimer le dessin.

Le choix des typographies est un autre aspect où ma formation en design graphique m’aide beaucoup. Cela m’a aussi été très utile pour concevoir mon site internet : disposition des éléments, contraste, combinaisons de typographies… autant de compétences issues de ma formation que j’applique dans ce projet.

— Carte réalisée dans le cadre d'un projet de jeu de guerre, 2023

Où travailles-tu ? Possèdes-tu un atelier ? De quoi a-t-on besoin pour se lancer dans une activité comme la tienne ?

Je travaille depuis mon appartement, qui me sert à la fois d’espace de vie et de lieu de création. Aujourd’hui, se lancer dans ce domaine est plus accessible que jamais grâce aux réseaux sociaux. Ils offrent une visibilité importante et sont en accès libre, ce qui facilite la diffusion de son travail.

Pour débuter, il suffit de peu de matériel : du papier, un stylo, et un téléphone portable pour capturer des photos de qualité. Si on veut aller plus loin, un logiciel comme Photoshop peut être utile pour retoucher légèrement les dessins, ajuster les couleurs, accentuer les contrastes, ou modifier les arrière-plans. Cela permet de soigner la présentation de ses œuvres.

L’autodidaxie a toujours été ma manière d’apprendre, que ce soit dans l’illustration ou dans d’autres domaines, et je continue à évoluer ainsi. Il est donc tout à fait possible de démarrer cette activité à partir de zéro, sur son temps libre et avec des moyens limités.

Tu travailles de manière autonome. À l’avenir, aimerais-tu collaborer dans un cadre plus collectif ou intégré, comme un atelier multidisciplinaire ou une marque ?

Oui c’est quelque chose qui pourrait m’intéresser, mais plutôt à temps-partiel, j’aimerai conserver une certaine liberté d’action, pouvoir évoluer dans mon coin aussi.

— “Couronne (héraldique) du Royaume de France” et “Armoiries des 12 commandants de la première croisade”, 2022

Quelles sont tes références artistiques et esthétiques ?

Je « consomme » beaucoup de contenu artistique sur les réseaux sociaux, qu’il s’agisse de peinture, de dessin, de design graphique ou encore de design d’interface. Cependant, je n’ai pas de référence ou de courant artistique précis. Quand je tombe sur quelque chose d’intéressant, je l’enregistre ou je prends une photo pour m’en souvenir. En revanche, pour mes dessins, j’essaie de ne pas m’inspirer directement d’autres artistes : je préfère laisser libre cours à mon imagination et faire ce qui me vient spontanément à l’esprit.

Ton univers est à 90 % d’inspiration médiévale. D’où te vient cet intérêt ? As-tu pensé à explorer d’autres périodes ou thématiques ?

Depuis mon enfance, l’époque médiévale m’a toujours fasciné. Cet intérêt s’est imposé naturellement dans mon travail. Cependant, je cherche à me diversifier avec le temps. Par exemple, j’aime tout ce qui touche à la conquête de l’Ouest ou à la Renaissance, et je compte explorer ces thématiques dans mes prochaines créations. Je prévois également d’aborder des sujets liés à la fantaisie : sorcières, loups-garous, mystères, et peut-être même quelques histoires d’horreur.

Ta pratique semble exclusivement monochromatique. As-tu envisagé d’intégrer la couleur ou de travailler des sujets abstraits ?

Lorsque j’ai lancé mon compte Instagram, j’avais l’intention d’utiliser des couleurs. Mais en avançant, je me suis rendu compte que la peinture ou la colorisation sont des disciplines à part entière, très différentes du dessin. J’ai donc décidé de me concentrer uniquement sur le noir et blanc.

— Louis VIII “Le Lion” Prince en 1214, futur roi de France & roi d'Angleterre (version anglophone)

Tu publies la plupart de tes contenus sous forme bilingue. Quelle place accordes-tu à ton audience internationale ?

Je me suis rapidement rendu compte, grâce aux statistiques, que la majorité de mes abonnés étaient à 90 % étrangers (tous pays confondus), bien que mon contenu ait initialement été conçu pour un public francophone.

En effet, bien que mon contenu bénéficie d’une exposition relativement équilibrée grâce à l’algorithme (50 % francophone, 50 % anglophone), mon audience internationale génère généralement beaucoup plus d’engagement que l’audience francophone.

Ainsi, j’ai donc décidé de proposer mes contenus en anglais tout en conservant le français en parallèle. Même si j’ai toujours eu des difficultés avec les langues étrangères, ce changement s’est avéré être une excellente opportunité : cela me permet de toucher une audience beaucoup plus large et diversifiée.

Tu partages désormais des vidéos où tu mêles narration (voix off), processus de création et Histoire médiévale. Comment t’est venue cette idée ?

Je suis arrivé sur les réseaux sociaux à un moment où TikTok explosait en popularité, entraînant le développement des vidéos courtes sur toutes les autres plateformes.

D’une part, j’ai voulu suivre cette tendance et explorer le domaine de la vidéo, qui m’était jusqu’alors inconnu. Cela m’a permis de passer du format image au format vidéo. D’autre part, ce format s’est imposé comme une solution évidente pour raconter des histoires. Si une image fonctionne bien pour présenter un dessin, elle est moins adaptée pour transmettre des récits complexes ou détaillés. La vidéo, avec une voix off, capte bien mieux l’attention qu’un long pavé de texte.

Raconter l’histoire d’un sujet pendant que je le dessine m’a semblé être un point de départ idéal pour mes premières vidéos. À l’avenir, j’aimerais développer et perfectionner ce format en proposant un contenu toujours plus abouti.

Sur ton site, on retrouve à la vente des dessins originaux, des tirages en édition limitée et des impressions en série non limitée. Peux-tu nous expliquer l’intérêt de ces différentes gammes ?

À mes débuts, je ne proposais que des impressions : des tirages en édition limitée ou non limitée, imprimés et expédiés via un service externe. Cela me permettait de gagner du temps sur la logistique. Par la suite, j’ai commencé à vendre mes dessins originaux.

Les originaux sont de loin les plus prisés : la majorité se vendent dans les 24 heures suivant leur mise en ligne. Cependant, ce mode de vente est aussi plus contraignant, car je dois gérer personnellement tous les aspects, de l’emballage à l’expédition.

Désormais, la plupart des dessins que je réalise sont destinés à être vendus en tant qu’originaux. À terme, il est probable que je n’ajoute plus de nouveaux tirages. Toutefois, je continue à proposer certains dessins sous forme d’impressions lorsqu’ils présentent des défauts : une rature, une erreur que je corrige numériquement, ou une qualité de papier qui ne me semble pas suffisamment satisfaisante. Je préfère éviter de vendre ces œuvres en tant qu’originaux.

— “Gauls” (février 2023) et “Minotaur” (novembre 2022)

As-tu un voyage, une œuvre, un film ou une musique qui t’a particulièrement touché et que tu aimerais partager avec nos lecteurs ?

Un jeu vidéo : Mount and Blade: Warband (plus précisément, le mod Anno Domini 1257 AD).

Quels sont tes projets et objectifs à court, moyen et long terme ?

À long terme, j’aimerais me développer sur YouTube en proposant des vidéos longues et en abordant des sujets historiques de manière beaucoup plus approfondie que ce que je fais actuellement. Parmi les thèmes qui m’intéressent : les croisades, la Reconquista, la guerre de Cent Ans, les expéditions des conquistadors, ou encore la conquête de l’Ouest.

Pour structurer mes vidéos, je m’appuierai sur des ouvrages d’historiens afin de bâtir le squelette du scénario et d’assurer la rigueur des informations présentées. Cependant, je compte également m’inspirer de chroniques et de témoignages d’époque, qui regorgent souvent de détails fascinants, parfois ignorés par les historiens dans un souci de concision.

Mon objectif est de proposer un récit différent de ce que l’on trouve actuellement sur les chaînes d’histoire : mettre davantage en avant les anecdotes, les détails, et la vie des acteurs des événements. Je souhaite également accorder une place plus importante à l’art de la guerre, en explorant les aspects stratégiques et tactiques des événements abordés.

Où peut-on retrouver ton travail, te suivre sur les réseaux et comment peut-on te soutenir ?

Vous pouvez me retrouver sur Instagram (@maison.trencavel), où je suis actuellement le plus actif, ainsi que sur YouTube (@MaisonTrencavel).

Pour me soutenir, le meilleur moyen est de commander une impression sur mon site internet. Plusieurs dimensions sont proposées, adaptées à tous les budgets : www.maison-trencavel.com

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